1862
A M. B.
Bien cher frère,
Je viens de recevoir votre lettre. Je bénis Dieu de tout mon cœur de ce qu’il vous a fortifié de corps et d’âme. Il est toujours fidèle, toujours bon ; on peut toujours compter sur lui, quoi qu’il en soit. Son amour ne change pas ; il pense toujours à nous – chose merveilleuse, mais vraie – et compte les cheveux de nos têtes. C’est merveilleux, en effet, que le Dieu de gloire entre dans tous les détails de notre vie, et toujours en vue de notre bénédiction. “Il ne retire pas ses yeux de dessus les justes,” et toutes choses contribuent au bien de ceux qui l’aiment.
Je vous prie de saluer affectueusement Mme B. Que Dieu bénisse aussi votre petit garçon ; c’est un souci sans doute dans ce monde, mais un souci que Dieu, si nous nous confions en lui, peut prendre, et prend de fait comme une occasion à de nouvelles preuves de sa fidélité et de sa bonté. Que Dieu vous accorde à tous deux d’être fidèles et de savoir l’élever pour lui.
Pour ce qui regarde l’histoire de St., je l’envisage un peu différemment de ce qu’on m’en a dit. Notre cher frère F. m’avait raconté quelques détails de ce qui s’était passé. Je n’envisage pas la position de ces sœurs comme une excommunication. L’assemblée seule pouvait les excommunier ; mais lorsqu’elles ont dit à plusieurs qu’elles ne voulaient pas venir à l’assemblée, ils étaient libres de dire leur sentiment et celui d’autres personnes, si elles l’autorisaient à le dire. Je ne dis pas que ce fût une chose sage ou selon Dieu, mais qu’ils étaient libres d’exprimer leur sentiment comme étant leur sentiment ; si c’est la chair qui a produit ce sentiment, il est clair qu’il n’était pas selon Dieu. Mais je crois qu’il n’est pas de la compétence d’un frère ou d’une sœur de se retirer de l’assemblée et d’y revenir à sa fantaisie. L’assemblée doit avoir son mot à dire là-dessus. Il se pourrait que celui qui s’est absenté ait commis toutes sortes de péchés pendant son absence. Ainsi, quant à ceux qui se tiennent à l’écart, l’assemblée doit dire si elle peut les recevoir, comme aussi l’individu peut vouloir revenir. J’espère, je veux dire que j’ai bonne espérance, que cela aura lieu, que l’assemblée sera bénie et restaurée par la grâce ; elle le sera, soit elle marche dans l’humilité et dans un esprit de dépendance de la grâce ; si la grâce agit dans le cœur de ces sœurs, elles jugeront ce qui a été de la chair en elles. Il se peut que N., ayant eu l’habitude de beaucoup diriger, il y ait eu de lui un manque de savoir-faire spirituel.
Votre part, j’en suis sûr, est de travailler selon la grâce et de communiquer aux âmes ce que Dieu vous aura donné pour elles, tout en nourrissant votre propre âme. Au reste, c’est ce qui est de beaucoup le plus utile pour l’assemblée elle-même. Je doute que ce soit la volonté de Dieu de priver une âme de la cène, parce qu’elle est dans un mauvais état. La Parole dit que l’on s’examine et qu’on mange ; mais si je voyais une âme dans un état de conscience que le péché aurait produit et qui ne saurait pas où elle en est, je puis, me semble-t-il, imaginer le cas où je pourrais lui conseiller de s’abstenir jusqu’à ce qu’elle fût au clair. Cependant, comme règle général, on ne peut pas exclure les âmes provisoirement, et ce ne serait que dans un cas particulier que je pourrais même donner ce conseil. Les soins pastoraux sont le remède qu’il faut à une âme en mauvais état, et non pas une exclusion temporaire. Ces soins manquent parfois un peu parmi les frères, et l’on recourt plutôt à des expédients. Je pense que les étrangers étaient des personnes qui n’étaient pas de la localité, principalement des frères, et en particulier des ouvriers du Seigneur (peut-être d’autres aussi), envers lesquels l’assemblée exerçait l’hospitalité. Diotrèphe ne le voulait pas. Vous pouvez voir que la seconde épître de Jean avertit la dame élue de ne pas recevoir ceux qui n’apportaient pas la saine doctrine à l’égard de la personne de Christ ; la troisième encourage Gaïus dans son hospitalité. Je pense que ce sont en général des chrétiens (tout en approuvant l’hospitalité en général, comp. Héb.13 v.2 ) à cause de ce qui suit. Le “qui ont rendu témoignage,” du v.6, s’applique au v.5 en général – (quelques-uns lisent : les frères et même ceux [d’entre eux] qui viennent du dehors) ; les v.7 et 8 montrent qu’il avait principalement en vue les ouvriers, car ainsi ils coopéraient avec la vérité. Diotrèphe ne voulait pas les recevoir désirant avoir l’assemblée à lui, et rompre le lien avec l’apôtre et tous les frères.
Quant au mot gentils – votre Diodati lie les mots : “sont sortis” avec “d’entre les gentils.” Il traduit ainsi : “Ils sont sortis d’entre les gentils pour son nom, sans rien recevoir.”
Cette interprétation n’est pas reçue de beaucoup de monde, cependant il y a des noms très respectables qui l’acceptent. Je pense que Jean, comme Pierre, s’attachait encore beaucoup au berceau judaïque du christianisme. C’est ainsi qu’en 1 Jean 2 v.2, il dit : “Il est la propitiation pour nos péchés, et non seulement pour les nôtres, mais aussi pour le monde entier.” Paul lui-même parle très souvent, comme en Gal.3, Eph.2, où “nous” se rapporte aux Juifs, “vous” aux gentils, “nous” de nouveau aux chrétiens. – Je pense qu’il s’agit plutôt des gentils croyants que des incrédules, mais il se peut bien que ces hommes ne voulussent rien recevoir de leurs parents. Les apôtres considéraient les Juifs (même incrédules) comme frères, non dans le sens chrétien, mais national ; Paul parlait ainsi dans ses discours. Les gentils n’étaient que des gentils, et il se peut bien que ce Diotrèphe ne voulût pas recevoir des ouvriers d’entre eux. Ces ouvriers devaient être reçus, et c’était un titre auprès des chrétiens de race juive, qu’ils n’avaient rien voulu recevoir des gentils, leurs parents incrédules ou autres.
Adieu, bien-aimé frère, que notre bon et fidèle Père, plein d’amour, soit avec vous, vous encourage et vous soutienne près de lui. Dans la jouissance de l’amour de Jésus, on est toujours bien, toujours encouragé.
Saluez affectueusement les frères partout où vous allez. – Que ceux de St., cultivent la paix, soient tranquilles, et cherchent par-dessus tout à croître dans la grâce de Jésus.
Votre bien affectionné frère.
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