New-York, 6 octobre 1867
A M. B.
Bien-aimé frère,
Je me réjouis beaucoup des nouvelles que vous m’envoyez au sujet de Nice. J’y vois la bonté de Dieu à l’œuvre. Quand un endroit a été longtemps sous la domination de l’ennemi, et ainsi sans témoignage ou pire que cela, c’est une grande et précieuse preuve de la bonté et de l’opération de Dieu lui-même, qu’un témoignage y soit suscité, que, par cette bonté, un chandelier, si petit soit-il, y soit placé, et une lampe allumée. Je me réjouis de ce que Dieu vous a fait la grâce d’y prendre part ; c’est encore le fruit de sa bonté et un encouragement pour vous. Je suis heureux aussi que les amis continuent à marcher dans le chemin de la foi à Milan. Saluez-les de ma part quand vous leur écrirez. Ici, nous sommes au jour des petits commencements ; c’est un effort pour obtenir un peu de réalité au milieu d’une masse énorme de profession où l’activité ne manque pas, mais où l’on justifie les bals, les théâtres et tout ce que vous voudrez. Un certain nombre d’âmes gémissent, mais ne savent que faire. L’idée du progrès de l’homme et de l’Evangile domine tout ; et cependant ils sentent que les choses vont bien mal, car, après tout, les papistes gouvernent la ville, qui est aussi mal gouvernée que possible, et les gens tranquilles vous disent : nous sommes à la merci de la populace irlandaise, chose assez bizarre dans un pays libre, mais qui a aussi beaucoup lieu en Angleterre. Ces Irlandais n’ont aucune retenue, et les honnêtes gens n’aiment pas à aller dans les bagarres ; la liberté est devenue la licence ; et l’on s’enrichit aux dépens des contribuables. Au milieu de toutes ces choses qu’on peut tout de même considérer en paix, Dieu forme une petite assemblée, très peu de chose, mais, je n’en doute pas, son œuvre. Il y a de vingt à trente personnes qui cherchent à glorifier le Seigneur, et ce sont en général des personnes fidèles. L’œuvre est de Dieu, car ce sont des gens sans aucune influence extérieure quelconque ; des commis, des caissiers et autres de la même classe, puis quelques personnes attirées pas un évangile plus simple et plus clair. Pour cette partie de l’œuvre, il me faudrait rester plus longtemps ici que je le pourrai. Mais il y a du dévouement chez ceux qui composent la réunion, et j’espère que Dieu les bénira. Je crois que ce que Dieu fait maintenant, c’est de former un noyau, tout en bénissant individuellement quelques âmes.
A Boston, le petit noyau appartient à une autre classe. Notre frère B., ancien ministre baptiste, y ayant des parents et des connaissances, le rassemblement commence à prendre quelque consistance, quoiqu’ils soient moins nombreux qu’ici. J’y irai sous peu, s’il plaît à Dieu. A l’ouest, cela va bien en général, et les fruits de mon voyage s’y sont montrés après mon départ.
Dans le Canada, l’œuvre se maintient ; il y a trois nouvelles réunions. Chez les Indiens, il y a progrès sensible. En général, les choses sont à peu près dans le même état ; sauf les cas susmentionnés, il n’y pas beaucoup d’énergie pour rassembler. C’est le dévouement que je cherche (hélas ! chez moi-même), et que Dieu veut partout, cet amour des âmes pour les chercher avec plus d’activité. On se ralentit, hélas ! facilement ; ce n’est pas que je fasse autre chose ou que ma vie, extérieurement soit moins occupée, au contraire. On travaillait à Ephèse (Apoc. 2), mais on peut perdre son premier amour quant à l’œuvre, tout en continuant à travailler. Que Dieu rallume en nous cette énergie de l’amour. Je sais que je vieillis, et je le sens, mais la grâce ne vieillit pas. Au reste, Il est toujours bon, et il exerce notre patience dans son œuvre pour notre propre bien.
En général, j’ai de très bonnes nouvelles d’Irlande et d’Angleterre. L’opposition est assez forte ; en cela il n’y a rien de nouveau ; mais les frères vont bien ; Dieu a manifesté sa bonté à leur égard et a fait progresser l’œuvre.
Saluez bien affectueusement les frères. J’ai, à New-York, au moins autant d’auditeurs de langue française que de langue anglaise ; trois Français et cinq Suisses rompent le pain. A l’ouest, il y a au moins une centaine de frères de langue française ; j’y ai trouvé des portes ouvertes.
Que Dieu vous bénisse, cher frère, avec vos chers enfants, et vous dirige dans cette tâche.
Votre bien affectionné frère en Jésus.
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